Sous-traitants oui, sous-payés non merci !

Publié le 08/05/2023

Intervention d'Elodie DUPUI, maroquinière et Déléguée Syndicale chez Arco Châtellerault (sous-traitant Vuitton), dans le cadre de la table ronde "Syndicats et luttes gagnantes", lors du 53ème congrès de la CGT à Clermont-Ferrand.

Je suis salariée à la maroquinerie ARCO de Châtellerault depuis 5 années. Mon entreprise de près de 1000 salariés est l’un des nombreux sous-traitants du groupe Louis Vuitton.

Comme des dizaines de milliers d’autres salariés, chez les donneurs d’ordre comme chez les sous-traitants, nous fabriquons des sacs à main de luxe pour Vuitton, d’autres pour Hermès ou Chanel, dont de nombreux modèles sont vendus plus de 2 ou 3 fois le montant de notre paye mensuelle. Nous sommes 80 % de femmes dans ce secteur à fabriquer des produits de prestige en étant payées à peine au-dessus du SMIC pour les sous-traitants. Ce travail rigoureux, où les conditions de travail sont difficiles, a des conséquences sur notre santé physique et mentale.

L’importance de valoriser le travail syndical

Certains collègues qui n’en pouvaient plus de cette situation, ont adhéré à la CGT il y a quelques années pour se présenter aux élections du personnel. Celles et ceux qui ont été élus ont essayé de développer la CGT grâce au suivi de l’Union Locale de Châtellerault et à l’appui de la fédération Textile Habillement Cuir Blanchisserie. Régulièrement sur les panneaux syndicaux, les délégué.es CGT ont valorisé les avancées, même celles qui paraissaient petites, pour montrer aux collègues le travail syndical et tout ce que l’on essaie de faire pour eux et avec eux.

En 2022, alors que l’inflation s’envolait, les ouvrières avaient compris l’enjeu de la négociation et attendaient avec impatience les NAO pour boucler leurs fins de mois. A la suite des propositions CGT à la 2ème réunion, alors que la délégation syndicale revendiquait 220 € brut, la direction n’en accordait que 90. Très déçues, plus de 500 salariées sont sorties en grève pour la 1ère fois.

3 jours de grève majoritaire dans les ateliers : 128€ brut de plus par mois pour toutes et tous.

Il aura fallu 3 jours de grève majoritaire dans les ateliers, et plusieurs propositions de la CGT, pour qu’un protocole de fin de conflit soit voté par les salariées et signé par la direction : + 128 € Brut de plus par mois pour toutes et tous, une majoration des heures de nuit, le maintien des primes, un forfait mobilité de 100 €, en plus d’1 journée par enfant malade par an rémunérée ! Nous avons douté et parfois eu peur de ne pas y arriver, mais le fait d’avoir été accompagnées localement par l’UL et appuyées nationalement par la fédération THCB nous a permis de prendre du recul sur notre conflit et de trouver une issue favorable pour les salariées dans cette négociation sous tension.

La CGT est représentative à 100% chez ARCO

Depuis, même si ce n’est pas toujours facile au quotidien, nous avons amélioré nos communications syndicales et avons réussi à renforcer la section syndicale en faisant adhérer de nombreuses collègues. Nous avons construit ensuite une liste pour les élections CSE qui vise à représenter la diversité des salariés de l’usine. En janvier nous avons fait élire tous les candidats au 1er collège et commencé une percée au 2ème collège. La CGT est représentative à 100% chez Arco ! Ceci nous donne plus de responsabilité mais participe concrètement à améliorer notre rapport de force.

« Notre retraite, on veut la vivre en bonne santé et on veut aussi que nos enfants aient du travail »

Nous sommes également nombreuses à participer aux grèves, aux débrayages et aux manifestations contre la loi sur les retraites qui veut nous faire travailler toutes et tous 2 ans de plus. Qu’ils viennent déjà voir l’état de nos mains, de nos bras ou de nos épaules à 60 ans ! Notre retraite, on veut la vivre en bonne santé et on veut aussi que nos enfants aient du travail.

Un syndicalisme du quotidien que les grands donneurs d’ordre du CAC40 cherche à réprimer

Dans ce secteur du luxe, comme ailleurs, il faut continuer à implanter la CGT en partant des réalités des salariés et plutôt que des grands discours il faut comprendre nos difficultés réelles. Chez nous le syndicalisme est nouveau et il mettra du temps à s’imposer aux donneurs d’ordre du CAC 40 qui cherche en permanence à le réprimer. C’est parce que la CGT écoute, accompagne, forme … bref qu’elle est utile au quotidien que nous pourrons avoir des grandes victoires sociales demain !

Comme dans nos tracts lors de la grève pour nos salaires, nous reprenons le mot d’ordre fédéral : sous-traitant, OUI, sous payé, NON MERCI !


Source  : Journal du THCB avril 2023 


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